Carnet n° 338 du 23 février 2015

« L’intérêt général n’est pas que la somme des intérêts particuliers »

 

S’il existe une conception anglo-saxonne de l’intérêt général qui le définit comme étant le résultat de la somme des intérêts particuliers, et si, dans les faits, cette conception gagne du terrain dans bon nombre de démarches dites citoyennes, voire se réclamant de la démocratie participative, où on voit s’exprimer en force des citoyens qui y défendent leurs préoccupations, problèmes ou intérêts individuels (et on peut les comprendre de le faire, c’est leur droit légitime),

 

il en existe une autre, plus latine et plus française, pour qui l’intérêt général a une finalité supérieure aux intérêts individuels.

 

Jean Jacques Rousseau l’exprimait déjà sèchement il y a 3 siècles :

 

« La somme des intérêts individuels nuit à l’intérêt général »

 

Georges Burdeau, un écrivain français du 20ème siècle, le reformulait ainsi :

 

« Une addition d’intérêts particuliers ne donnera jamais pour somme l’intérêt général »

 

Et aujourd’hui, personne ne peut le contester, si construire des logements pour répondre à un besoin vital et accessoirement relancer la croissance et l’emploi peut être qualifié « d’intérêt général » il faut savoir que c’est le plus souvent au nom d’une addition d’intérêts particuliers, que près d’un projet collectif sur 2 fait l’objet d’une contestation et que ce sont des désaccords sur les constructions de logements ainsi exprimés qui ont contribué, au sein de la MEL, à faire basculer de gauche à droite un bon nombre de municipalités.

 

Résultat chiffré en la matière : si en 2014 ce sont 2500 logements sociaux qui avaient été programmés en 2013 (sous ma vice-présidence), en 2015 il n’en reste plus que 1500, mars 2014 étant passé par là.

Et je pourrai citer d’autres exemples et les multiplier à tous les niveaux.

 

Il en est de l’intérêt général et des intérêts particuliers comme d’une structure et de ses éléments (comme je l’expliquais à mes élèves au temps où j’enseignais) :

Une structure ne peut se résumer à la somme de ses éléments. Il faut leur rajouter leurs liens et interactions entre eux.

 

Un exemple : si vous avez une pièce de 1000 kg à soulever et autour d’elle 20 hommes capables de soulever 50 kg, ce n’est qu’en coordonnant leurs efforts que vous arriverez à faire bouger la pièce.

 

Il en est de même des grands projets, des réformes et du changement qui verront toujours se mobiliser contre eux tous ceux qui sont gênés et jamais vraiment ceux qui sont d’accord.

Au delà du jugement politique porté sur la loi Macron, il suffit de regarder les mobilisations catégorielles contre elle (alors que dans le même temps tout le monde dit vouloir des réformes) et alors qu’une large majorité politique libérale ne pouvaient logiquement qu’approuver des mesures de libéralisation (qu’à juste titre une partie de la gauche pouvait refuser).

 

Autour du gouvernement seuls se sont exprimés celles et ceux qui était contre tél ou tels points de cette loi.

 

On en a vu le résultat.

Sauf à capituler, le gouvernement ne pouvait que passer en force, ce que Manuel Valls avec sa pugnacité, que cela plaise ou non, a décidé de faire.

 

Et de rappeler à ce stade ces mots de Jean Jaurès :

 

« Est dirigeant celui qui accepte de prendre les risques que les dirigés ne veulent pas prendre »

 

Alors, oui, dans une commune, un département, une région ou un pays, s’il est parfois difficile de déterminer sur chaque sujet ce qu’est l’intérêt général on est sûr qu’il ne peut pas être que l’addition d’intérêts particuliers souvent contradictoires.

 

Un autre exemple pour illustrer : une grande majorité de français considère qu’il y a trop de fonctionnaires.

Il est d’autres majorités, tout aussi grandes, (souvent d’ailleurs les mêmes) qui considèrent qu’il n’y a pas assez de policiers, pas assez de gendarmes, pas assez de juges, pas assez de gardiens de prisons, pas assez de militaires, pas assez de personnels de santé, pas assez d’enseignants, pas assez d’agents pour s’occuper des jeunes enfants et des personnes âgées etc. etc. etc.

 

Une majorité nette de sondés disent donc leurs envies de services publics à tous les niveaux et leur exigence de diminuer le nombre d’agents qui les remplissent.

 

A Villeneuve d’Ascq, nous en avons eu, une fois encore, l’illustration mardi lors du débat d’orientation budgétaire en vue du budget 2015 :

L’opposition UMP/FN a dénoncé le poids des salaires des agents communaux en proposant des coupes plus ou moins sévères tout en demandant davantage de policiers municipaux, de places en crèches et d’agents dans les écoles.

Une partie de cette opposition a même demandé des coupes en profondeur dans les associations (qui font pourtant la richesse et le vie de notre ville), osant, pour sa défense, user de cette formule « même si nous ne voulons pas éradiquer les associations ».

 

Dans le Larousse, on lira : éradiquer : faire disparaître un mal, une maladie).

C’est ce qu’on appelle : « le poids des mots » !

 

Si aujourd’hui le grand méchant loup de la fable déguisé en mère-grand peine à cacher ses attributs, on sent bien que l’on n’est plus très loin du moment où il se jettera sur le petit chaperon rouge pour le dévorer.

 

Avis aux citoyens qui ne s’en rendent pas compte et aux forces politiques qui lui font la courte échelle !

 

A ce stade, tous les moyens sont bons :

 

  • contrevérités sur les chiffres
  • interprétations fantaisistes de ces chiffres et, « cerise sur le gâteau », à propos de leurs axes centraux :
  • un plan pluriannuel d’économies
  • l’armement de la police municipale,

on les retrouve dans la presse au même moment dans les propositions du Maire UMP de la Madeleine.

 

Au demeurant, et je le reconnaît, les débats de mardi ont su conserver un niveau démocratique correct sans excès d’agressivité et je m’en félicite.

 

Et nous avons donc de bonnes bases pour ajuster un budget 2015 qui sera débattu (et sans doute voté) le 24 mars prochain qui nous permettra de continuer à

 

  • rénover notre ville, ses quartiers et son Centre,
  • conforter nos services publics,
  • maintenir les éléments de notre attractivité et notre rayonnement,
  • préparer un renforcement équilibré de nos dispositifs de sécurité en lien avec les services de l’État dont c’est la responsabilité première.

 

En faisant, bien sûr, de nouveaux efforts d’économies (pour la 8ème année consécutive).

 

Le tout, à l’intérieur d’une MEL (Métropole Européenne Lilloise) où je continuerai à me battre pour une vraie solidarité (qui ne doit pas concerner que les pleureurs) et une reconnaissance des efforts faits par les communes qui font du logement, développent des entreprises et donc des emplois, au bénéfice de toute la MEL.

Il faut là aussi que les choses soient dites et faites clairement au nom de « l’intérêt général ».

 

J’aurais pu aussi aujourd’hui parler :

  • d’une fermeté nécessaire de l’Europe sur le dossier Ukrainien … intérêt général
  • d’une action renforcée contre les terrorismes … intérêt général
  • de ce qu’apportent les pays qui y consacrent de gros moyens et de l’énergie au détriment de leurs équilibres budgétaires… intérêt général.

 

J’aurais pu, de manière badine parler d’un LOSC à la dérive et d’un ESBVA féminin à la conquête guerrière…

 

Je veux, pour en terminer ou presque, parler d’un ami, d’un grand de la vie sportive et associative Villeneuvoise qui nous a quitté brutalement lundi à 49 ans, Didier Picot, et de la douleur qui nous a envahi depuis,

 

Et si comme l’a écrit Albert Einstein,

« La vie, c’est comme une bicyclette, il faut avancer pour ne pas perdre l’équilibre »,

une citation associée à une autre beaucoup plus ancienne de Socrate :

« Existe t-il pour l’homme un bien plus précieux que la santé ? »,

 

n’oublions pas que cette semaine verra des anniversaires dont le plus important : les 45 ans de la Nouvelle Ville de Villeneuve d’Ascq,

avec, pour ce qui me concerne, 39 ans à son service en tant qu’élu Villeneuvois depuis février 1976 année de ma première élection.

 

« C’est en allant vers la mer que le fleuve reste fidèle à sa source »

(Jean  Jaurès)

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