Le journal d'une mauvaise herbe, 101 carnets au fil du temps
… pour quelques coquelicots de plus

Carnet n°90 du 11 juin 2010
La liberté d'être libres.


On nous dit qu'à compter d'aujourd'hui, 11 juin 2010, la 19ème coupe du monde va occuper, depuis l'Afrique du Sud, la quasi-totalité de l'activité terrestre.

Moi qui ne suis pas spécialement un fan de ce type de show médiatique, commercial, voire sportif, je ne dirai pas que cette perspective m'enthousiasme.

J'ai même failli ouvrir mon carnet sur l'Afghanistan ou même Christine Boutin... un « scandale » en quelque sorte, aux yeux sans doute de beaucoup de mes lecteurs.

Au demeurant, il est pour moi un élément très important dans cet événement... c'est son lieu : l'Afrique du Sud et celui qui le symbolise le mieux : Nelson Mandela. Il y a un quart de siècle, en effet, y régnait l'Apartheid. Je me souviens de ces années 80 où nous nous étions retrouvés sur l'île de Gorée près de Dakar pour un grand rassemblement contre ce système criminel.
Nelson Mandela n'était encore qu'un rebelle. Aujourd'hui, il est un sage et une référence.

C'est donc par ses paroles que je commencerai. Elles parlent bien sûr de liberté, lui qui a connu 27 années de prison :
« Nous ne sommes pas encore libres, nous avons seulement atteint la liberté d'être libres »
J'ai une pensée émue pour lui ce matin, à l'heure de la reconnaissance mondiale de son pays et à l'instant où un destin cruel vient de le priver d'une de ses petites filles âgée de 13 ans, victime accidentelle des festivités organisées dans son pays.

On m'autorisera quand même à accompagner cette citation d'une autre venue d'un sportif même si elle ne concerne pas que le sport. Elle est de Pierre de Coubertin : « L'important dans la vie, ce n'est point le triomphe, mais le combat. L'essentiel n'est pas d'avoir vaincu, mais de s'être bien battu ».
J'ai néanmoins beaucoup d'amis et de connaissances qui attendent « un peu plus » de nos joueurs.
19ème coupe du monde de football, les expressions nationales, les couleurs, « les peintures de guerre » et les hymnes ne vont pas manquer.

J'en connais qui s'en offusqueront, moi pas. Si le nationalisme guerrier est dangereux, la référence nationale ne l'est pas, elle qui crée des attaches et rappelle nos racines.

Je le dis lors de chaque commémoration patriotique y compris celles qui rappellent des périodes « complexes » et même contestées de notre histoire.
Il n'y a pas de raison de ne pas être fier de notre patrie, la France, de son drapeau et de son hymne, la Marseillaise.
S'il faut avoir un regard lucide sur notre histoire, c'est pour mieux construire la suite de cette histoire, en évitant autant que faire ce peut, de commettre les mêmes erreurs et les mêmes fautes.

Je suis Européen, c'est mon avenir, je suis Français, c'est ma patrie.
J'aime notre république et ses valeurs de liberté, d'égalité, de fraternité et de laïcité.
Je n'ai aucun état d'âme ni aucune réticence à le répéter à toutes celles et à tous ceux qui nous rejoignent en venant du Sud et de l'Est avec leurs propres racines, histoires, valeurs et traditions.

Je suis fier d'être Français et ce n'est pas pour autant que j'ai renié mes origines polonaises.
Au contraire, j'en ai fait apport à la France dans tout ce que j'ai fait de et dans ma vie.

« Dans la plupart des pays, les citoyens possèdent la liberté de parole. Mais dans une démocratie, ils possèdent encore la liberté après avoir parlé » André Guillois

Oui, si le monde des médias va vivre au rythme de la coupe du monde, le monde réel va vivre à celui de la crise, de la misère, de la violence et de la guerre.

Entre les plans d'austérité, les famines et les pénuries, la poudrière du Moyen-Orient, la machine à polluer chinoise et les massacres intégristes en Afghanistan... « il n'y a pas à dire... l'enfer est bien de chez nous ».

« Jeudi 10 juin... Afghanistan... un mariage... un attentat suicide : 40 morts, 70 blessés ».
Et dire qu'il est de beaux esprits qui trouvent des excuses aux terroristes.

Si je me refuse à faire miennes ces paroles pessimistes de Amboise Bierce :
« Paix : dans les affaires internationales, période de duperie entre deux périodes de combat », quand même, il m'arrive de douter.

Foot planétaire, guerres, violences, crises et misères. Voilà un bien curieux tableau en ce 11 juin 2010.

Mais sans céder à un pessimiste excessif, convaincu que je suis, comme mère Térésa, d'une réalité :
« la vie est un combat, accepte-le ! », je terminerai mes écrits de ce jour par un coup de gueule à propos du désengagement de notre société, de l'État et de certaines collectivités sur la question du « grand âge ».
Je l'ai souvent dit et écrit : il ne suffit pas de rajouter des années à la vie, il faut aussi sinon surtout, rajouter de la vie aux années.
Pour cela, il faut y mettre des moyens financiers et budgétaires sans oublier d'y mettre du cœur pour loger, soigner, s'occuper et accompagner le vieillissement.

Or, voilà, l'État qui se retire, les caisses sociales qui assèchent et le département qui gèle ses concours. Les prix vont augmenter, les retraites diminuer, les bénéficiaires les plus modestes, de fait, seront exclus !
Les deux à trois prochaines années s'annoncent terribles dans les EHPAD sauf à imaginer des prises en charge démesurées des communes avec, à la clé des hausses d'impôts conséquentes.

Pire que le dossier des retraites (car moins médiatique), la prise en charge du vieillissement !
Je tire la sonnette d'alarme.
Si on juge une société à sa manière « de s'occuper de ses vieux », nos sociétés dites modernes n'ont pas lieu d'être fières d'elles-mêmes.

A côté de cela, les débats sur les réformes institutionnelles sont bien dérisoires.

C'est pourquoi, je terminerai aujourd'hui avec Albert Jacquard :
« Mon objectif n'est pas de construire la société de demain, c'est de montrer qu'elle ne doit pas ressembler à celle d'aujourd'hui ».







090