Le journal d'une mauvaise herbe, 101 carnets au fil du temps
… pour quelques coquelicots de plus

Carnet n°78 du 30 avril 2010
Le travail : un échange.


« Partout où l'homme apporte son travail, il laisse quelque chose de son cœur ».
C'est avec cette citation de Henryk Sienkiewicz que je veux ouvrir ce 78ème carnet à la veille du 1er mai et de la fête des travailleurs sur un registre sans doute moins traditionnel que les discours et manifestations qui vont rythmer cette belle et grande journée.
Si, en effet, le travail ne pouvait être mythifié à l'image de ce qu'ont fait les défenseurs d'un ordre ancien (chacun se souvient du slogan Vichyste « Travail – Famille - Patrie » et du triste chemin qu'il a fait prendre à notre pays), il est sûr qu'on ne peut imaginer une vie humaine sans travail et le travail sans sa dimension humaine.

À l’heure d'un chômage massif et des risques de faillite de nos systèmes de retraite, il est plus que temps de resituer le travail dans sa plénitude sociétale en commençant à le déconnecter du « sacro-saint » contrat de travail.
Le travail, c'est, somme toute, un échange entre ce que tout individu reçoit ou doit recevoir d'une entreprise ou d'une société et ce qu'il doit apporter, grâce à ses efforts, à l'entreprise ou à la société.
C'est peut-être en réfléchissant dans cette direction qu'on sortira du carcan que l'on veut nous imposer dans le débat sur l'avenir des retraités où, d'un côté, on demande un allongement des durées de cotisations sur la base de salaires (qui souvent n'existent plus) et, de l'autre, des sources nouvelles de prélèvements sans doute socialement justes mais concrètement insuffisants.

La question est posée : demain nos enfants vivront cent ans avec une période plus ou moins longue de formation, une période plus ou moins longue de vie professionnelle encadrée par un contrat de travail et une période plus ou moins longue de repos plus ou moins relatif et de retraite plus ou moins active.
C'est tout cela qu'il faut essayer de prendre en compte pour assurer une vraie vie tout au long des années de la vie !

J'aime cette pensée de Charles Baudelaire : « A chaque minute, nous sommes écrasés par l'idée et la sensation du temps. Il n'y a que deux moyens pour échapper à ce cauchemar : le plaisir et le travail. Le plaisir nous use, le travail nous fortifie ».
Pour ce qui me concerne, j'ai choisi le travail pour échapper au cauchemar du temps qui, tel du sable fin, nous glisse entre les doigts.

A propos du travail justement, celui que j'ai rappelé à LMCU, ce mercredi, lors de la première conférence annuelle sur le logement n'aura échappé à personne, pas plus que celui qui est en cours sur de multiples chantiers dans notre ville (équipements, logements, entreprises, espaces publics), sans oublier les travaux qui accompagnent la prochaine réouverture du musée d'Art moderne communautaire niché au cœur du parc urbain de Villeneuve d'Ascq.

Chantiers en cours toujours, hier le référé des « 2sous du Stade » pour faire interrompre les grands travaux du stade du LOSC est « tombé ». Il était attendu depuis plusieurs semaines et il ne nous a donc pas surpris.
Le républicain, que je suis, attend très sereinement la décision du tribunal administratif prévue le 19 mai.

Pendant ce temps-là, tout ce que l'on compte de « beau linge » dans la métropole, en France et en Europe s'est donné rendez-vous à Shanghai, pour présenter sa révérence à ce curieux mélange de communisme politique et de capitalisme économique qu'est aujourd'hui la Chine.
Il est dans notre histoire trop de « grand-messes » qui finalement n'ont fait que conforter des systèmes en place dont on a pu, plus tard, mesurer les perversités...

Aimer l'histoire, c'est aussi cela, la connaître dans ses réalités pour déceler ces réalités dans des situations nouvelles même « reliftées ».
C'est ce même raisonnement qui me conduit depuis le début à soutenir une loi contre la burka et donc à saluer le courage de nos amis belges qui malgré leur crise gouvernementale l'ont voté à la quasi-unanimité.
C'est ce qui m'a amené à soutenir la position chez les socialistes de Manuel Vals.
La faiblesse provoque toujours des abus, dans nos vieilles sociétés démocratiques d'abord mais aussi chez les citoyens « anonymes » ou non.
Une belle émission TV nous l'a rappelé en nous parlant de très grands noms aux derniers pas de leurs vies parmi lesquels Charles Trenet ou Raymond Devos...
Mais, à côté d'eux, combien, de plus anonymes, abusés ignominieusement ?

À l’heure où j'ai entamé une des dernières étapes de ma vie, ces questions me taraudent.
« Je me révolte donc je suis » a écrit Albert Camus.

Oui, tout cela me révolte, comme me révolte de lynchage de la Grèce, comme me révolte l'arrogance des « agences de notation privées » qui s'octroient un droit de vie et de mort sur des collectivités et maintenant sur des états.
Nous vivons aujourd'hui la pire forme de capitalisme, sans visage, sans cœur ni âme, bien pire, j'ose le dire, que celui qu'incarnaient les grands patrons d'autrefois.

Alors oui, on peut se rassurer avec le procès de Charles Pasqua, avec le retour pour être jugé du dictateur Manuel Noriega fait chevalier de la Légion d'Honneur par le gouvernement français de l'époque... (C'était en 1987).

On peut se dire que les Français ne sont pas dupes, qui rejettent massivement Monsieur Sarkozy et ses politiques et qui à 75% voient la France prendre le chemin de la grève.

Mais peut-on et doit-on se consoler encore ainsi ?

Je voudrais, pour terminer, parler de la culture et de l'art populaire avec le musée d'Art moderne, et d'art brut mais avec aussi l'art dans la rue et demain sur nos lacs, avec « Entre-lacs », un événement de dimension nationale : des créations naturelles, fantastiques, éphémères sur notre chaîne de lacs ! C'est une aventure partenariale « extraordinaire » dans tous les sens du terme, et, sans doute, un identifiant pour l'image pérenne de notre ville.

J'illustrerai cet acte de foi dans la culture, notre culture et dans la ville, notre ville par deux citations.
L'une est de Pablo Picasso :
« Il n'y a d'art ni passé ni futur. L'art qui n'est pas dans le présent ne sera jamais ».

L'autre encore plus profonde dans une dimension métaphysique que je fais mienne.
« L'art est à l'image de la création. C'est un symbole tout comme le monde terrestre est un symbole du cosmos ». (Paul Klee)

A la veille du 1er mai, quel bel hommage ainsi rendu au travail qui est au cœur de la vie humaine.







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