Le journal d'une mauvaise herbe, 101 carnets au fil du temps
… pour quelques coquelicots de plus

Carnet n°99 du 27 juillet 2010
Le monde est un endroit magnifique.


Après mon circuit annuel d'un centre de vacances à l'autre (le premier date d'août 1977), d'Habère Poche à Bellevaux, de Bellevaux à Die, de Die à Rémuzat, de Rémuzat en Ardèche et d'Ardèche à la Haute Savoie en retour, je me suis décidé à prendre quatre jours de repos.

A peine arrivé, je me précipite dans la première librairie venue, espérant y trouver un dernier Christian Jacq qui me fera "revisiter" l'Égypte ancienne. Point de nouveau Christian Jacq. Un peu déçu, je flâne alors le long du rayon des derniers ouvrages de l'été à la recherche d'un thriller, et là, surprise, un roman illustré du portrait de Nicolas Sarkozy au titre terrible : « Le président est mort ».

J'hésite à l'acheter, craignant une provocation doublée d'un voyeurisme indécent.
Finalement, je le prends et très vite je me plonge dans sa lecture avec, en bouche, un curieux goût en imaginant ce que doit ressentir notre Président à la lecture de cet ouvrage.

Aujourd'hui, ne l'ayant pas encore terminé, tant il fourmille de détails et d'intrigues, je ne dirai que deux choses :

C'est, je crois, Louis XIV qui le faisait déjà remarquer en disant qu'un roi vivant au pouvoir absolu n'avait même pas à sa mort ce qui reste au plus humble de ses sujets...

Voilà, une nouvelle fois, une belle leçon d'humilité pour tous les grands (et moins grands) de ce monde dont certains ont fini pire que des animaux tandis que les autres, même au sommet de leur gloire, étaient réduits à l'état « d'objet » dans un cérémonial toujours destiné aux vivants...

Et je repense, en cet instant, à François Mitterrand nous racontant le 5 juillet 1985, au cours d'un déjeuner qu'il affectionnait, les obsèques, Place Rouge, de Leonid Brejnev en mars 1982 avec son corps isolé, pratiquement oublié de tous, sinon de sa veuve tout de noir vêtue, un signe de croix au bout du doigt...
Heureusement, ce livre de l'été n'est qu'un roman et, on m'autorisera à le dire, je suis content qu'il en soit ainsi et que notre Président soit vivant en ce mois de juillet 2010, un mois où j'ai pu moi-même encore vérifier cette phrase de La Fontaine : « On rencontre sa destinée souvent par les chemins qu'on prend pour l'éviter »quand le 18, je me suis retrouvé, sans le vouloir, à l'endroit où, 30 ans auparavant, j'avais appris le décès de ma maman.

Heureusement, et malgré tout, à cet instant, je pense comme Ernest Hemingway que « Le monde est un endroit magnifique pour lequel il vaut la peine de se battre ».

C'est pourquoi, jusqu'à mon dernier souffle, je me battrai pour un monde meilleur, plus juste, plus libre, plus solidaire et plus honnête !

C'est pourquoi , je dénonce l'attitude du pouvoir UMP dans l'affaire Bettencourt : un homme, un vrai, reconnaîtrait ses erreurs, la tête haute, en cessant de nier certaines évidences.

C'est pourquoi, aujourd'hui, je m'inquiète d'une justice qui, largement à tort, donne l'impression « d'être aux ordres ».

C'est pourquoi, je ne décolère pas quand je vois l'échec de 8 ans de pouvoir sécuritaire avec un président qui passe à Grenoble, dix minutes, pour y déclarer (excusez du peu) que « le gouvernement entend rétablir l'ordre public et l'autorité de l'État ».

C'est pourquoi, j'hallucine quand je vois les mêmes, enfin, s'adresser à l'Union Européenne pour que les Roms puissent rester dans leur pays au lieu de s'étaler dans nos villes dans des conditions déplorables et sans aucun contrôle de l'État Français.

C'est pourquoi je comprends la colère de ceux que l'on appelait autrefois « les classes moyennes », pas assez pauvres pour être aidés, pas assez riches pour véritablement vivre, des classes moyennes qui voient leurs prestations diminuer, de menus avantages fiscaux disparaître, toutes leurs charges augmenter et leurs revenus stagner.

Des riches, de très riches d'un côté, des pauvres, de très pauvres de l'autre, de moins en moins de citoyens entre les deux ; voilà la description que l'on faisait autrefois des pays sous-développés et des pays à la veille de crises « révolutionnaires » graves...
Et de repenser à ce film « Que la fête commence » de Bertrand Tavernier de 1975 sur la régence d'un Louis XV encore mineur.
La Révolution est encore loin, les ingrédients des révoltes sont déjà là !

Mais attention, depuis, tout s'est accéléré, et le temps en particulier.

Alors comme l'écrit Taslima Nasreen :
« Quand cessera-t-on de penser qu'on peut fabriquer des citoyens de demain en éduquant les enfants avec de simples slogans sans rien modifier de l'environnement pestilentiel qui les entoure ? »

Quand arrêtera-t-on la langue de bois et le « politiquement correct » qui nous interdisent de voir et de dire les périls qui nous menacent ?

Dans les mois qui viennent et quoiqu'il risque de m'en coûter, je n'entends pratiquer ni la langue de bois ni le politiquement correct pour parler des risques d'éclatement de notre République en rappelant les nécessités de Liberté, Égalité, Fraternité et Laïcité.

« Là où l'infini de l'espace recoupe l'infini du temps, on trouve un endroit précis à un moment donné ; j'y suis » Grégoire Lacroix.







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